vendredi 20 mars 2015

Méthanisation à Ouroux : pot de terre contre pot de fer ?

 

Lettre ouverte aux porteurs du projet, aux habitants, aux élus et aux administrations

 

 

Calendrier :
3 mars 2014 : présence d’un géomètre dans le pré de la Tallebarde et découverte du projet par les riverains
20 mars 2014 : élections municipales
10 avril 2014 : réunion publique d’information organisée par la SAS Grosne Biogaz : vive contestation
10 juillet 2014 : organisation par la SAS Grosne Biogaz d’une « concertation citoyenne » en présence de médiateurs
1er octobre 2014 : pour ou contre un réseau de chaleur communal dépendant de la méthanisation ? Vote défavorable du Conseil Municipal
janvier 2015 : mise en vente par M. Alain Gobet du pré de la Tallebarde
février 2015 : déclaration des porteurs du projet à la presse : subventions attendues en juin, premier coup de pioche annoncé pour septembre 2015
17 mars 2015 : rencontre du CPVVGO* avec M. Philippe Lacondemine, Conseiller Régional, M. Alain Morin, Président de la CCHB (Communauté de Communes du Haut Beaujolais) et l’ADEME Rhône-Alpes (Agence De l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie)


    Au vu des articles récemment parus dans la presse et de la rencontre du 17 mars avec les élus ci-dessus, l’implantation d’une unité de méthanisation à Ouroux est bel et bien maintenue à La Tallebarde (entrée nord du village).
     Rappelons que le projet, porté par dix agriculteurs, impacte une ZNIEFF (zone naturelle d’intérêt écologique faunistique et floristique) de catégorie 1, des riverains, tout un village dont de nombreux habitants et amis ne veulent pas voir l’entrée défigurée par une telle installation ni subir les nuisances occasionnées par ce type de projet. (Voir sur le Net : « La fausse promesse d’une énergie propre », documentaire d’Arte du 14 mai 2013).

     Concernant les nuisances, précisément, l’article du Patriote daté du jeudi 5 février 2015 précise que le projet « représente un budget estimé à 1 782 000 €, budget qui a été majoré pour tenir compte du traitement des odeurs et de l’aménagement paysager. » Qu’en est-il du bruit ? Le CPVVGO a pourtant largement alerté la SAS Grosne Biogaz sur la configuration géographique si particulière à Ouroux – construit en fond de vallée et cerné de moyennes montagnes amplifiant considérablement les sons. 

     Par ailleurs, le 6 juillet 2014, l’un des porteurs du projet a écrit au CPVVGO : « L’Etat ne soutient le projet que si 60% de la chaleur est utilisée. Sans ce soutien, le projet ne verra pas le jour. »   
     Dans le même courrier, il est précisé que « Seul le réseau de chaleur municipal répond au volume produit ». 

    Le 1er octobre 2014, le Conseil Municipal de notre village, « considérant vouloir rester indépendant de tout projet privé » et « considérant que l’étude ne couvre pas les besoins énergétiques de l’ensemble des bâtiments communaux », s’est prononcé contre le raccordement de la Commune à un réseau de chaleur alimenté par cette méthanisation.
    Pourtant, la SAS Grosne Biogaz n’a pas renoncé à son projet. Pour bénéficier de la prime énergétique de l’ADEME, il lui faut impérativement valoriser la chaleur produite par la méthanisation. Elle s’est donc orientée, aux dires de M. Morin (ce 17 mars) vers « une entité nouvelle : séchage de granulés bois ». Cette unité serait installée dans l’ancienne fromagerie (SCOFF).
    Quel bruit ces installations complémentaires produiront-elles ?
    Quel trafic supplémentaire génèreront-elles dans le village et ses alentours ?
    Quel niveau de dégradation du cadre de vie cela entraînera-t-il pour Ouroux et ses habitants ?

     Dans son compte rendu de la « concertation citoyenne » du 10 juillet 2014, la SAS Grosne Biogaz concluait ainsi :
« […] la tranquillité des riverains, la sécurité et la protection de l’environnement sont au cœur des préoccupations des porteurs du projet. Nous maintiendrons cette exigence de transparence et de co-construction dans la suite de l’élaboration de ce projet. »
     Depuis cette « concertation citoyenne » et son compte-rendu du 8 septembre 2014, la SAS Grosne Biogaz n’a communiqué aucune information. Faut-il rappeler qu’au cours de cette « concertation » où étaient invitées, entre autres, les 9 associations d’Ouroux, les quatre groupes de réflexion (bruit, odeurs, trafic, paysage) ont tous proposé un changement de lieu d’implantation de la méthanisation, parfois à une grande majorité de voix ?
    Avec l’installation d’une unité de granulés bois, la SAS Grosne Biogaz  reste sourde à ces doléances et décide de passer en force en se maintenant à La Tallebarde. Pourquoi ne pas tenir compte des sensibilités exprimées le 10 juillet ? S’il s’agit réellement d’un projet territorial, pourquoi ne pas respecter ce territoire et ses habitants en installant  une méthanisation et une unité de séchage sur un site neutre, impactant le moins possible la nature, le patrimoine et les hommes – sur l’une des exploitations agricoles concernées, par exemple ? Les prospecteurs et promoteurs qui « chassent au trésor » en repérant les lieux où implanter des méthanisations verrouilleraient-ils les projets au point que les agriculteurs concernés ne puissent se désengager du site initialement retenu si tel était finalement leur vœu ?

     Une fois encore, il est clair que la SAS Grosne Biogaz œuvre de son côté, sans tenir compte des voix exprimées, et en faisant du village d’Ouroux la béquille d’un projet privé. Cette manière d’agir aggrave la situation conflictuelle vécue par la population d’Ouroux.

     Ce village mérite respect et considération : à ce titre, vous pourrez trouver matière à réfléchir dans le feuillet joint : " Des hommes, le fil de la pierre et le bon cours de la rivière ".

Notre Assemblée Générale se tiendra 
 le vendredi 24 avril 2015 à 20h00
à la Salle des Fêtes d'Ouroux. 
Vous y êtes cordialement invités.

Des hommes, le fil de la pierre et le bon cours de la rivière


Le cadastre de 1825 : une véritable carte au trésor pour qui veut connaître l’histoire de la Grosne à la Tallebarde.






Sur 100 mètres en pente régulière, le pré était traversé par un étroit canal (bief) qui amenait l'eau vers un bassin ; elle repartait alors en direction du bâtiment de la tannerie et corderie (actuelle maison de la Tallebarde). L'eau contournait ensuite la bâtisse pour alimenter plus loin un autre bief.

Si l’on descend dans la rivière, on y trouve encore des traces liées à ces aménagements : ce sont des pierres taillées, autrefois appareillées, et qui supportaient les ouvrages en bois des écluses destinées à réguler le cours de la rivière alimentant le bief, son bassin, son déversoir ... le bâtiment de la Tallebarde, et les terrains au-delà.





Ce système ingénieux de gestion et d’utilisation de l’eau remonte certainement au Moyen Âge et permet d’imaginer le site à l’époque (maisons en bois, tannerie, activités diverses liées à l’eau…). Mais la découverte de bouts de poteries gauloises révèle une occupation encore plus ancienne des lieux, tout comme les pierres cyclopéennes du chemin du Bûcheron et un menhir découvert aux Chassagnes. Le dégagement immédiat du pré sur un point élevé – Gros-Bois –, conforte la thèse de l’établissement d’un village gaulois au pied de cette montagne qui a dû servir d’oppidum (point haut fortifié) en des temps reculés.

Par ailleurs, lors des travaux d’assainissement à Ouroux en été 2014, le percement de la chaussée a permis de dégager un aqueduc d'1m20 de hauteur, intact sur 40 m de long. Il faisait probablement partie du réseau d’aqueducs romains mentionné par les historiens qui se sont penchés sur Ouroux, et a peut-être été remanié au Moyen Âge.



A moitié bouché par une argile épaisse (en lien avec la fameuse catastrophe de la Croix de l’Etang, où une partie d’Ouroux fut noyée sous les eaux ?) il partait du Pont de la Grosne, sur 80 mètres, en direction de l'Aye, route de Monsols. Malheureusement, cet ouvrage remarquable n'a pas résisté aux pelleteuses.

L’histoire d’Ouroux est marquée par la présence gauloise et romaine puis, du haut Moyen Âge jusqu'au XIIème siècle, par la famille de Nagu. Peut-être, lasse des influences de Cluny, celle-ci quitta-t-elle Ouroux pour Varenne (Quincié), faisant perdre son rayonnement à cette cité antique qui avec Dun, Resdunum (St Pierre le Vieux), Brandon (Branadunum), Suin (Segodonum) ... fermait la marche sud du pays Éduen. Aussi, jadis, les hommes suivaient le fil de la pierre et le bon cours de la rivière ...

Bien que l'histoire d'Ouroux soit marquée par la présence de l'eau, celle-ci « s'égare » parfois sur les documents officiels et en subit les dommages ... Par exemple un ruisseau, mal répertorié sur la carte, se trouve dans la réalité du terrain au pied de la station d'épuration de la Scoff. En 2014, la police de l'eau et la DDT sont intervenues pour rectifier cette erreur de tracé et déclarer en cours d'eau ce ruisseau qui descend de Gros-bois dans le pré de la Tallebarde.



Dans nos belles contrées nous sommes toujours un peu en retard ... mais face à de tels fourvoiements, nous pourrions prendre un peu d'avance ! Cette rivière classée et son cours d'eau, ce pré et cette bâtisse ne sont pas des lieux banals : ils appartiennent à l'histoire d'Ouroux, à sa physionomie, à son identité profonde. Aires de stockage de fumier et de lisier, cuves, méthaniseur et autre cogénérateur n'y ont pas leur place.

Faut-il tout laisser faire, et achever de détruire des sites encore préservés dont on se rendra compte plus tard – trop tard – qu'ils étaient la véritable richesse de nos territoires ruraux ?

Olivier Albert pour le CPVVGO

Photos complémentaires aqueduc












                                           


Photos complémentaires Le cours d'eau et sa ripisylve


          Partons des étangs qui figurent sur la carte et suivons le cours d'eau

                        photos réalisées en période de très faible pluviométrie


































                Traversons la route et passons dans le pré de la Tallebarde